Petru Mironescu, nouveau Vice-président recherche à Lyon 1
Petru Mironescu, Professeur à Lyon 1 et chercheur à l’Institut Camille Jordan, est le nouveau vice-président recherche de l’université. Entretien avec cet enseignant-chercheur en mathématiques.
Comment et quand a débuté votre attrait pour les mathématiques ?
Le go?t pour les mathématiques était un peu dans l’air du temps de la société dans laquelle j’ai grandi - en Roumanie -, elles étaient considérées comme la base d’une éducation solide. J’ai grandi dans l’idée que les mathématiques étaient quelque chose d’intéressant, et leur étude une activité enrichissante. Mais cela s’est vraiment cristallisé au lycée lorsque j’ai intégré le milieu des olympiades. J’ai alors débuté des préparations spécifiques, où j’ai commencé à en apprendre plus sur les mathématiques et à vraiment y prendre go?t.
Et votre parcours après le lycée ?
J’ai suivi des études à l’Université de Bucarest. Je me suis alors rapidement orienté vers une branche des mathématiques qui s’appelle l’analyse mathématique, sans doute influencé par les professeurs extraordinaires que j’ai eus dans ce domaine, dont j’admirais la fa?on d’enseigner et de réfléchir.
? la fin de mes études, j’ai été enseignant dans un lycée. Puis, je suis devenu assistant à l’Université de Bucarest, avant de venir en France faire une thèse à l’Université Paris 6 - actuellement Sorbonne Université. Notre discipline étant parmi celles qui favorisent la mobilité, après ma thèse j’ai eu un poste de Ma?tre de Conférence à l’Université Paris Sud Orsay - actuellement Université Paris Saclay. Puis, pour devenir Professeur des Universités, j’ai eu une opportunité de poste à Lyon 1.
Sur quoi portent vos travaux de recherche ?
J’ai commencé par travailler sur des équations aux dérivées partielles - ce sont des équations dont l’inconnue est une variable physique (température, densité, …) qui permet de décrire l’état d’un système. Dans mon cas, la motivation venait des supraconducteurs, qui sont des matériaux qui n’opposent pas de résistance électrique. Puis, je me suis intéressé aux propriétés des fonctions adaptées à la description de ce type de phénomène physique, pour travailler actuellement dans un domaine des mathématiques que l’on appelle la théorie des fonctions.
Dès le lycée, on apprend en mathématiques à calculer des dérivées et des primitives de fonctions. Ce sont les bases historiques de la théorie des fonctions. Seulement, on sait depuis longtemps déjà qu’il n’est pas possible de calculer exactement la primitive de certaines fonctions, ce qui a amené à des études plus qualitatives. Par exemple en étudiant à quel type de fonction connue elles vont ressembler, ou dans quelle mesure elles sont lisses (dérivables, deux fois dérivables, …). C’est l’une des lignes de recherche de mes travaux, mais appliquée à des objets mathématiques complexes, et dans un cadre né au milieu du 20e siècle.
En parallèle, vous avez également une importante activité de formation…
En 2007, je suis devenu responsable du Master de mathématiques à Lyon, aujourd’hui organisé en deux Masters : Mathématiques et applications et Mathématiques appliquées, statistique. Je me suis par ailleurs fortement investi dans la préparation aux concours de l’agrégation de mathématiques - formation reconnue sur le plan national – et également dans les activités pédagogiques hors-classe, avec l’organisation de deux écoles internationales pour élèves et étudiants. Pendant deux ans, j’ai été aussi directeur de la bibliothèque de mathématiques qui, bien qu’intégrée à la bibliothèque universitaire, se trouve dans le même b?timent que l’Institut Camille Jordan. C’est une bibliothèque accessible aux étudiants en master.
Et quelle articulation faites-vous entre recherche et formation ?
Ce que l’on observe, c’est que la bascule de la formation vers la recherche se fait assez tardivement. Typiquement en fin de Master, lorsque les étudiants sont en fait déjà intéressés par la recherche. Nous avons néanmoins besoin de développer plus en amont des actions qui facilitent le passage de la formation à la recherche, ou du moins visent à développer deux qualités essentielles pour un chercheur : l’autonomie et le sens critique.
Dans cette perspective, j’ai mis en place, dans la licence de mathématiques, un groupe de lecture au cours duquel des étudiants lisent et présentent un livre de mathématiques. C’est une fa?on de sortir du cadre purement scolaire, pour amener les étudiants à la première étape de la recherche : comprendre par soi-même. Bien entendu, ce n’est qu’un (petit) début : la clé de vo?te du passage à la recherche est le doctorat.
Crédits photographie : Eric Le Roux/Direction de la communication